Les tests psychométriques ne font pas l’unanimité. Utiles pour les uns, d’une utilité discutable pour les autres, ils sont employés dans le recrutement de cadres depuis un bon moment. Pour les chasseurs de têtes, se sont avant tout des outils complémentaires parce que ces professionnels ont développé une expertise enviable au niveau des entrevues d’embauche structurées. Voyons pourquoi les tests psychométriques peuvent être utiles pour recruter des cadres.
Les tests de personnalité prédisent-ils le comportement au travail ?
La psychométrie est la science qui étudie l’ensemble des techniques de mesure utilisées en psychologie. Ces techniques tentent de mesurer objectivement l’esprit humain sous différents angles. Ainsi le psychologue peut mesurer des aptitudes intellectuelles, des compétences, des connaissances techniques ou la personnalité, tout cela en fonction des besoins de l’employeur. Mais un test de personnalité a-t-il une valeur prédictive du comportement futur d’un cadre dans l’exercice de ses fonctions ?
Souvent, les plus grands utilisateurs de tests psychométriques sont les grandes organisations qui ont un taux de roulement de personnel élevé. Ils utilisent ces tests pour évaluer rapidement des connaissances spécifiques, indépendamment des diplômes reçus, de l’expérience, du CV ou du profil LinkedIn et cela auprès d’un grand nombre de candidats qui postulent pour des postes spécialisés et moins décisionnels.
Mais un test de personnalité peut-il avoir une valeur prédictive du succès futur d’un cadre supérieur qui assurera d’importantes responsabilités ?
La personnalité, clé de la performance ?
Évidemment, la réussite dans les affaires n’est pas corrélée à un seul type de personnalité. Si vous pensez à des présidents d’entreprise comme Bill Gates, Pierre-Karl-Péladeau, les frères Lemaire qui ont fondé l’entreprise Cascades ou Elon Musk, ils ont tous des personnalités différentes. Mais ils ont tous réussi.
Une entreprise déjà existante qui recrute et qui a besoin d’un type de personnalité spécifique pour un poste de cadre supérieur sera bien desservie par un test psychométrique qui vient enrichir le travail de recherche et d’entrevue déjà accompli par le recruteur. Dans un esprit d’embauche collaborative, un des rôles clés du recruteur est justement de bien comprendre les besoins de l’entreprise et de les faire ressortir dans les entrevues de sélection.
Les tests psychométriques, surtout ceux de personnalité, offrent une grille de lecture de l’esprit humain qui permet de mieux en cerner les forces et les faiblesses. C’est pourquoi personne n’aime ça. C’est normal, cet aspect « d’objectivité scientifique » est parfois difficile à accepter pour les sujets humains que nous sommes, candidats comme recruteurs.
Et bien sûr, les tests psychométriques ne sont pas parfaits. Ni les recruteurs d’ailleurs. On pourrait presque dire que le recrutement de cadres n’est pas une science, mais un art. Voilà, c’est dit! Les tests psychométriques ont leurs limites; l’intuition humaine a aussi ses limites.
En psychométrie, on dit qu’un test est valide lorsqu’il mesure spécifiquement la caractéristique qu’il cherche à mesurer. Pour évaluer la personnalité d’un candidat, le questionnaire d’autoévaluation Myers Briggs demeure le test psychométrique qui est le plus couramment utilisé. Dans ce test, le candidat évalue lui-même différents aspects de sa personnalité. Par exemple, le fait d’être « consciencieux au travail » peut être mesuré par une série de questions qui explore les différentes facettes de ce trait de personnalité.
Mais le fait d’être consciencieux au travail a-t-il une valeur prédictive de la compétence au travail? On pourrait croire que oui à première vue.
Et pourtant.
Une méta-étude devenue classique
La plus connue des méta-études pourtant sur la valeur prédictive des tests psychométriques est celle de Schmidt et Hunter (1998) qui ont publié une recension de toutes les précédentes études réalisées sur la validité prédictive des différents outils d’évaluation de la personnalité.
Les auteurs sont arrivés à dégager le tableau suivant, lui aussi très connu. Ce tableau présente les corrélations existantes entre différents moyens de sélection utilisés par les employeurs, les recruteurs, les chasseurs de têtes ou les services de ressources humaines et les résultats obtenus.
Un score se rapprochant de 1 montre une meilleure corrélation qu’un score près de zéro. Autrement dit, plus le chiffre se rapproche de 1, plus « l’outil de sélection » est valide pour prédire la performance future d’un candidat.
Outil | Validité prédictive |
Échantillon de travail | 0,54 |
Aptitudes intellectuelles | 0,51 |
Entrevue structurée | 0,51 |
Test de connaissances | 0,48 |
Entrevue non structurée | 0,38 |
Personnalité : consciencieux | 0,31 |
Références | 0,26 |
Nombre d’années d’expérience | 0,10 |
Graphologie | 0,02 |
À la lecture de ce tableau, on constate que le trait de personnalité « consciencieux au travail » n’apparait pas parmi les meilleurs outils de sélection. Des outils de sélection comme les échantillons de travail (les réalisations), les aptitudes intellectuelles, l’entrevue structurée, voire même l’entrevue non structurée et les tests de connaissances obtiennent un meilleur score. Seules, les références et la graphologie font pire.
Les tests de personnalité mesurent effectivement comment un individu diffère de la moyenne, mais ne peuvent prédire (ou avec moins de certitude) comment un individu s’adaptera à un contexte spécifique.
C’est peut-être ce qui explique que les employeurs font davantage appel aux chasseurs de têtes qu’aux tests psychométriques pour recruter des cadres et des dirigeants performants! Les tests de personnalité de type Myers Briggs, l’un des tests de personnalité les plus couramment utilisés dans le monde, font un portrait général de la personnalité d’un individu, les classant en « 16 types de personnalité ». Est-ce suffisant ?
En recrutement, on utilise surtout l’entrevue d’embauche structurée, le meilleur outil de sélection à la disposition du chasseur de têtes pour faire avancer le processus d’embauche.
L’entrevue d’embauche structurée est un outil souple, convivial et dynamique qui permet de passer en revue les réalisations d’un candidat, de définir les besoins spécifiques de l’employeur et du candidat, de voir si la culture d’entreprise conviendra au candidat, etc. Pour les chasseurs de têtes, les tests psychométriques représentent un outil parmi d’autres et pas nécessairement le premier sur la liste. D’ailleurs, ils ne feraient pas partie de la liste des 5 conseils pour accroître vos chances de recruter le meilleur candidat.
Des mises en situation en disent long
Dans un processus d’embauche de cadres, on cherche à savoir comment un candidat agira dans ses nouvelles fonctions et s’il se plaira dans son nouvel environnement de travail. Les mises en situation sont beaucoup plus utilisées que les tests de personnalité. Ces scénarios du quotidien sont très utiles pour faire l’inventaire des soft skills du candidat. C’est plus près de la réalité. Pour leur part, les tests de connaissances font bien lorsqu’il s’agit d’évaluer les compétences d’un candidat pour un poste technique.
Dans la réalité, les personnalités qui réussissent bien au travail savent comment pallier leurs « faiblesses ». Elles ont de l’expérience et c’est souvent le cas avec des cadres ou des dirigeants, car elles ont eu plusieurs années pour se connaître en situation réelle. Elles peuvent très bien performer en compensant leurs lacunes. Un bon vendeur réservé, oui, ça existe. Et un bon vendeur réservé devenu vice-président des ventes aussi. D’une certaine façon, il est plus important de bien se connaître que d’avoir des traits de personnalité « idéaux ».
Alors pourquoi utilise-t-on les tests psychométriques?
Parce que les tests psychométriques sont utiles dans certaines situations. Voici trois exemples.
Cas # 1 : Tester pour départager deux excellents candidats
Si une entreprise connaît certains problèmes au niveau de sa direction pour des questions d’ordre relationnel comme le « style de leadership » ou « l’intégration du candidat au comité de direction », un test de personnalité pourrait être utile, voire décisif, pour aider à départager les profils de deux candidats déjà interviewés.
Pour donner un exemple concret, supposons que le mandat d’un chasseur de têtes soit de recruter un vice-président des ventes. Premièrement, le coût d’un mauvais choix peut s’avérer assez élevé à ce niveau hiérarchique de l’entreprise.
Supposons que le principal problème soit que la personne qui occupait ce poste était trop autoritaire avec ses directeurs et avec l’équipe de vente, jugée par ailleurs très performante. La personnalité très rigide de ce cadre supérieur soulevait des critiques à l’interne, les performances de l’équipe de ventes commençaient à s’en ressentir et après avoir perdu quelques bons représentants, le président de l’entreprise a tranché : le vice-président des ventes devait quitter.
On comprendra que cet employeur soit particulièrement sensible au style de leadership du nouveau candidat pour le poste de directeur des ventes. Il cherchera un type de personnalité plus conciliant. Disons une main de fer dans un gant de velours.
Supposons que la direction de cette entreprise désire mettre en valeur l’aspect « diplomate » ou « bon motivateur d’équipe », ce point lui apparaissant comme une qualité cardinale pour le nouveau candidat. Supposons également que ni le chasseur de têtes ni l’employeur n’arrive à faire son choix pour départager deux excellents candidats à la fin du processus d’embauche. Eh bien, dans ce cas, un test de personnalité sur mesure portant sur des aspects spécifiques de la personnalité liés aux compétences relationnelles pourrait être utile pour tenter de faire un choix final.
Les tests psychométriques peuvent donc être utilisés vers la fin du processus de recrutement avec l’objectif de départager deux excellents candidats. Autrement dit, l’objectivité scientifique du test psychométrique peut permettre de compléter le travail de fond du chasseur de têtes.
N’oubliez pas la variable « temps »
Généralement, après deux rencontres avec le chasseur de têtes et deux autres avec l’employeur et une situation où l’on n’arrive pas à départager, on pourra demander aux deux candidats finaux de passer un test de personnalité sur mesure.
Il faudra d’une demie à une journée entière pour compléter l’exercice. En effet, à la différence d’un test d’aptitude ou de connaissances, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses dans un test de personnalité. Il y a aussi rarement une limite de temps, car les responsables de l’analyse de ces tests souhaitent que vous répondiez honnêtement aux questions, sans stress supplémentaire.
Il sera aussi nécessaire d’attendre l’évaluation des résultats des tests par le psychologue, les seuls professionnels dûment autorisés pour évaluer les tests psychométriques. Cela peut prendre jusqu’à une semaine. Les résultats peuvent aussi susciter des explications ou des discussions avec l’employeur potentiel. Ajoutez quelques jours de plus et le compte y est.
Il y a donc une variable « temps » à ajouter à l’équation.
Cas # 2 : Tester pour développer les compétences d’un candidat
L’autre bonne raison de faire passer un test psychométrique à un candidat pourrait être de développer ses compétences. Dans cette approche plus proactive que réactive, l’employeur ne cherche pas à recruter le cadre intermédiaire idéal, mais celui qui a le plus de potentiel de se développer dans son entreprise.
Cette approche peut constituer une bonne stratégie pour contrer la pénurie de main-d’œuvre actuelle et développer le talent, à condition de favoriser l’utilisation de bonnes stratégies de rétention des employés. Recruter un candidat qui n’a pas encore toutes les compétences souhaitées, mais possède des habiletés certaines pour les acquérir et une grande motivation pour ce faire peut s’avérer payante.
Ce cadre intermédiaire qu’on recrute pourrait bien un jour monter dans la hiérarchie. Il possède de bonnes habiletés sociales, mais il a besoin de développer certaines habiletés liées à la gestion, par exemple sa capacité à planifier. On constate également qu’il saura diriger en montrant l’exemple, mais qu’en l’état actuel des choses il aura de la difficulté à contrôler le travail. Ce n’est le plus important. Ici, on pense à long terme.
En effet, certains candidats possèdent des traits de personnalité qui en font d’excellents employés appelés à progresser sur le moyen terme. L’employeur qui décide de mesurer ce potentiel non dans un but de sélection, mais de développement de compétences, afin que cet employé prometteur puisse un jour accéder à un poste d’une grande importance pour l’entreprise, fait un bon choix. Il recrute dans une optique de développement des ressources humaines.
Un test psychométrique peut aider à faire une « photo » du potentiel d’un candidat.
Cas # 3 : S’auto-tester pour se sentir à la bonne place
Pour le candidat à un poste de cadre, « passer un test psychométrique » est aussi une bonne façon de ne pas être déçu par ses nouvelles responsabilités.
Dans la mesure où il est informé par l’employeur ou le recruteur du style de gestion et de personnalité recherché, le candidat pourra être tenté, surtout si l’offre est alléchante au niveau salarial, de jouer le jeu en biaisant, sciemment ou non, les réponses.
Pourtant cette stratégie n’est pas une stratégie gagnante.
Tout le monde veut être le plus heureux possible au travail et cela demande d’être en accord avec la culture de l’entreprise, avec les responsabilités qui viennent avec le poste, mais aussi avec l’équipe dont on est responsable, sans oublier l’équipe de direction à laquelle il faut rendre des comptes régulièrement.
Aucun cadre ne souhaite devenir l’éléphant dans le magasin de porcelaine quelques semaines ou quelques mois après une nouvelle embauche. Généralement, quand un employeur démarre un processus d’embauche au niveau supérieur de la hiérarchie de son entreprise, il sait ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas.
Chaque candidat qui passe un test de personnalité a tout intérêt à être honnête avec lui-même dans l’optique de trouver le meilleur « mariage » possible avec un poste qui lui convient. « Connais-toi toi-même », disait Socrate, qui aurait sans doute été un des premiers adeptes de la psychométrie!
Un chasseur de têtes expérimenté saura vous guider dans votre processus d’embauche. Grâce à son expertise unique, il pourra vous aider à trouver le cadre dont vous avez besoin et sur l’opportunité d’utiliser ou non un test psychométrique pour le sélectionner. N’hésitez pas à nous contacter.